Jean-Luc Mélenchon descend jeudi soir à Caen dans l'arène des élections européennes pour convaincre, à l'occasion de son premier meeting au côté de la tête de liste de La France insoumise Manon Aubry, que leur "écologie populaire" supplante les autres approches.

Car si les Insoumis contestent toute fiabilité aux sondages, et placent l'écologie au centre de leur programme depuis plusieurs années, ils admettent aussi scruter les dynamiques que les enquêtes esquissent à grands traits. Actuellement, crédités d'entre 7 et 9% des intentions de vote en vue du scrutin du 26 mai, ils sont au coude-à-coude avec la liste EELV de Yannick Jadot pour la première place à gauche, un déclassement certain par rapport à la présidentielle de 2017 où Jean-Luc Mélenchon avait récolté 19,58% des voix.

Les Insoumis résument leur souhait de convergence samedi entre les "gilets jaunes" et la manifestation "La Marche du siècle" pour le climat par le slogan "Fin du monde, fin du mois, même responsables, même combat", et y mettent toute leur force logistique cette semaine: 500.000 tracts, 100.000 autocollants, 20.000 affiches...

Sur le fond, Jean-Luc Mélenchon et Manon Aubry doivent dérouler à Caen leurs propositions de politique environnementale à l'échelle de l'Union européenne. Ajout à leur programme, ils demandent cette semaine l'instauration d'un règlement et d'une agence européens de la "règle verte", concept-phare de la pensée insoumise, selon lequel "on ne doit prélever à la nature que ce qu'elle peut reconstituer, et ne produire que ce qu'elle peut supporter".

"Un premier pas", selon Manuel Bompard, numéro 2 de la liste. Car les élections européennes, et c'est là toute la difficulté de la campagne des Insoumis, ne résoudront vraisemblablement pas les inconvénients qu'ils trouvent à l'UE.

"Le cadre des traités européens actuels empêche une politique écologique digne de ce nom, car ils figent dans le marbre les principes d'austérité qui conduisent à la destruction des services publics comme le ferroviaire, empêchent tout protectionnisme et relocalisation des activités, favorisent le libre-échange", estime M. Bompard, en écho à la tribune de Jean-Luc Mélenchon lundi dans plusieurs journaux européens.

- "Etatisme" -

Sur la forme, les Insoumis ont, ces dernières semaines, développé un argumentaire contre leurs concurrents écologistes. Ainsi pour Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot a opéré "un changement de cap" "très grave" en disant ne pas exclure que les Verts européens signent "un contrat de gouvernement" avec le PPE (droite), les libéraux de l'ALDE et les sociaux démocrates du PSE.

M. Jadot a depuis affirmé qu'aucune coalition n'est envisagée avec le PPE. "Il semble vouloir concilier écologie et libéralisme", a regretté M. Mélenchon.

Sergio Coronado, ancien d'EELV aujourd'hui candidat sur la liste LFI, explique: "Je ne vais pas jeter la pierre aux eurodéputés EELV, certains ont fait du bon travail comme sur la pêche électrique. Mais le groupe Vert au Parlement européen est dirigé par les Grünen allemands, qui sont dans la logique du marché et de l'écologie libérale".

Des "attaques" que Yannick Jadot dit prendre, auprès de l'AFP, "avec beaucoup de distance": "Décidément la politique selon Jean-Luc Mélenchon c'est de la brutalité, contre des personnes, là il est contre moi. Moi mon objectif c'est de sauver l'Europe pour sauver le climat (...) On est pour réguler l'économie, mais pas pour brutaliser la société et un étatisme centralisé."

Comme les Insoumis, EELV appelle les lycéens à faire grève pour le climat vendredi et défilera au sein de "La Marche du siècle" samedi. Cependant, là où les premiers veulent une "convergence" avec les "gilets jaunes", Yannick Jadot souhaite que ceux dans le mouvement de contestation qui "reconnaissent l'impératif écologique rejoignent la Marche", même si "une partie d'entre eux n'y sont pas particulièrement sensibles".