La précarité a été aggravée par les différentes crises qui se sont succédées, désormais "l'arbitrage entre se loger, se chauffer et se nourrir est devenu de plus en plus complexe : parmi les personnes qu'on accueille pour la première fois, 17% n'ont pu faire qu'un seul repas la veille !", alerte le président de l'association fondée par Coluche, Patrice Douret, ce lundi 21 novembre sur France Info.

Covid-19, guerre en Ukraine, inflation... les différentes crises qui se sont succédées ont nettement aggravé la précarité. Au micro de France Info, les Restos du Coeur, qui lancent leur 38e campagne annuelle mardi, ont tiré la sonnette d'alarme. "En trente-sept années d'existence, les Restos du cœur n'avaient jamais connu une telle situation", alerte le président de l'association fondée par Coluche, Patrice Douret, ce lundi 21 novembre.

"L'accès à l'alimentation est devenu beaucoup plus difficile pour les plus modestes. Depuis le mois d'avril, nous avons accueilli 12% de personnes en plus dans nos centres par rapport à la même période l'année dernière. Par ailleurs, la situation des personnes que l'on accueille s'est aggravée : 60% d'entre elles sont en-deçà de la moitié du seuil de pauvreté (qui s'établit à 1.102 euros par mois, donc 551 euros), contre 50% lors de notre précédente campagne. Et 30% d'entre elles ne déclarent aucune ressource, contre 20% auparavant", poursuit-il.

"L'arbitrage entre se loger, se chauffer et se nourrir est devenu de plus en plus complexe : parmi les personnes qu'on accueille pour la première fois, 17% n'ont pu faire qu'un seul repas la veille !", continue le président des Restos du Coeur.

Les bénévoles également en difficulté

"On accueille davantage de familles monoparentales, avec des mamans seules. Plus d'un enfant de moins de 3 ans sur quatre né dans une famille pauvre en France est accueilli aux Restos. Et le nombre de ces très jeunes enfants bénéficiaires est en hausse de 25% depuis le mois d'avril. (...) On doit tout faire pour briser cette chaîne de reproduction de la précarité : il faut empêcher ces enfants de devenir les adultes pauvres de demain", explique-t-il encore. "Vu l'augmentation de l'activité qui est à craindre, nous aurons besoin de la générosité de tous, probablement plus que d'habitude", conclut-il.

Patrice Douret souligne également les difficultés rencontrées par les bénévoles : "Ils donnent du temps, mais ils n'ont pas à donner de l'argent. Or, on a des retours croissants de bénévoles qui nous alertent sur le fait que leur activité leur coûte cher, par exemple à cause des déplacements en voiture." Ces dépenses donnent droit à un avantage fiscal... mais seulement pour ceux qui payent déjà des impôts. Patrice Douret réclame au gouvernement, depuis des années, que sur ce point précis la réduction soit transformée en crédit d'impôt, pour bénéficier aussi aux bénévoles modestes. Une demande qu'il aura l'occasion de réitérer mardi au ministre des Solidarités Jean-Christophe Combe, attendu dans un centre de distribution d'Asnières-sur-Seine, près de Paris, pour le lancement de cette 38e campagne.

Même constat chez d'autres organisations caritatives

Pour mieux tenir compte de l'inflation, l'association vient d'adapter ses règles : pour évaluer si une personne est éligible à une aide, elle prend désormais en compte non seulement ses revenus et son loyer, mais aussi ses frais de chauffage.

D'autres organisations caritatives font le même constat. Les banques alimentaires, qui lancent elles aussi leur collecte nationale cette semaine, "répondent actuellement à une hausse de 9% de la demande, soit 200.000 personnes supplémentaires accueillies", ont-elles indiqué dans un communiqué. Et près de la moitié des ménages ayant sollicité l'an dernier l'aide du Secours catholique disposaient d'un budget insuffisant pour se nourrir au quotidien, alerte l'association dans son récent rapport annuel sur la pauvreté. Or, pour répondre aux besoins croissants des plus précaires, les associations doivent elles-mêmes composer avec des coûts en hausse, ce qui fait redouter un "effet ciseaux".